Pouvoir et opposition en Guinée Conakry: la bagarre permanente entre le chat et la souris
Qui en veut au porte-parole de l’opposition guinéenne ? C’est la question qui est actuellement sur toutes les lèvres à Conakry, mais à laquelle il est, pour l’instant, difficile de répondre, tant le mystère est entier.
En effet, le 4 avril dernier, le sieur Aboubacar Sylla, puisque c’est de lui qu’il s’agit, a été la cible d’une attaque perpétrée aux environs de 20h par deux individus armés non encore identifiés qui, dit-on, ont réussi à caillasser son véhicule. De quoi raviver les tensions dans un pays où la violence est la chose la mieux partagée.
Car, l’opposition n’est pas passée par quatre chemins pour dénoncer un « terrorisme d’Etat » visant à casser de l’opposant, au moment même où la polémique enfle autour du calendrier électoral. Et pour ne rien arranger, l’opposition appelle ses militants à descendre dans la rue le 13 avril prochain, pour dire non au phénomène de l’insécurité en Guinée.
Rappelons que peu avant cette agression du porte-parole de l’opposition, Mme Boiro, un haut cadre du gouvernement et un haut fonctionnaire du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) du nom de Thierno Aliou Diaouné, trouvaient la mort dans des circonstances jusque-là non élucidées.
On ne peut donc pas absoudre à peu de frais le régime du président Alpha Condé qui a l’obligation régalienne d’assurer la sécurité de tous les Guinéens sans aucune distinction politique, sociale, régionale ou ethnique. De ce point de vue, l’opposition, en tant que contre-pouvoir, est dans son bon droit de manifester pour rappeler aux autorités les obligations qui sont les leurs, si tant est qu’elles les aient oubliées.
Seulement, dans un pays comme la Guinée, où la haine fraternelle a pignon sur rue et où l’armée a la gâchette facile, il y a lieu de craindre des risques de dérapages qui pourraient plonger le pays dans une nouvelle spirale de manifestations avec leurs lots de cadavres inutiles. Une grosse tornade est donc en vue.
Car, on le sait, la bagarre entre pouvoir et opposition en Guinée, ressemble à l’incompatibilité naturelle qui existe entre le chat et la souris. Et c’est peu dire. Car jamais, les deux camps, même au nom de l’intérêt supérieur de la Nation, n’ont accepté de se donner la main.
Il ne sert à rien de maintenir allumée la flamme de la tension
On a d’ailleurs la fâcheuse impression que l’opposition travaille à rendre ingouvernable la Guinée, pour empêcher la réélection du président Condé qui, malheureusement, prête à tous égards le flanc, s’il ne joue pas, sans le savoir, le jeu de ses contempteurs.
Imbu de sa personnalité et fort de son caractère bien trempé, Alpha Condé, pour autant qu’on le sache, n’a jamais initié, comme on le voit souvent ailleurs, un cadre de dialogue avec son opposition, dans la perspective de trouver une solution réelle et durable aux multiples maux qui plombent le développement de son pays.
Pourtant, en sa qualité de chef de l’Etat, il devrait savoir se mettre au-dessus de la mêlée, se montrer bon prince, en acceptant parfois de faire des concessions, notamment en concédant l’organisation des législatives avant la présidentielle, comme le lui demande l’opposition. En tout état de cause, il ne sert à rien de maintenir allumée la flamme de la tension. Ce d’autant qu’une telle conjoncture sociopolitique peut pousser certains investisseurs à plier bagages, si cela ne dissuade pas ceux qui s’apprêtaient à fouler le sol de Conakry.
Il faut donc savoir raison garder en évitant les excès. Cela dit, l’opposition aussi, doit comprendre que rien ne sert de tirer indéfiniment à boulets rouges sur le pouvoir. Car, rien ne dit que l’agression de son porte-parole contre laquelle elle fulmine, n’est pas l’œuvre d’une crapule en quête d’expédients, ou un grossier montage au sein de son propre camp, destiné à ternir l’image du régime de Condé.
Afp